L’éducation en terre raisonaliste : une refonte radicale du système français
__________
Le ‘raisonalisme’, concept développé dans les précédents articles de cette série, prône une société fondée sur l’équilibre entre raison, liberté individuelle et bien commun. Il se présente comme un antidote au capitalisme sans limites, ouvrant la voie à une liberté nouvelle éclairée par la raison.
Appliqué à l’éducation, il implique une refonte des structures afin de répondre aux défis contemporains : désinformation, individualisme croissant et crise des repères collectifs.
LE DIAGNOSTIC
Malgré des décennies de réformes successives, l’Éducation nationale demeure prisonnière d’un modèle figé, presque inébranlable, malgré une efficacité remise en question.
Le problème est double.
À l’intérieur : l’enseignement reste très spécialisé et compartimenté, centré sur quelques matières, au détriment de nombreux sujets majeurs de la vie courante. Pourtant, selon le dernier rapport de l’OCDE (2024), la France figure parmi les pays où le niveau des élèves en compréhension de l’écrit et en mathématiques a le plus régressé depuis vingt ans.
À l’extérieur : le terrain est maintenant monopolisé par les réseaux sociaux qui l’ont investi avec force. Une étude de l’INSEE révèle ainsi que 60 % des 15-25 ans s’informent principalement via ces plateformes, où les contenus éducatifs sont noyés sous les algorithmes publicitaires.
Cet espace externe interfère avec la diffusion de l’enseignement et semble lui être imperméable, puisqu’il est inscrit dans une logique capitaliste qui traverse l’ensemble de la société.
Ainsi, l’Éducation nationale française instruit sans véritablement éduquer ; ce déficit d’éducation laisse les élèves en proie à une soumission culturelle, sous couvert d’une liberté d’expression largement orientée par les algorithmes des réseaux sociaux.
UNE PROPOSITION FORTE
La transformation en profondeur de l’éducation s’articule autour de trois piliers : une Éducation nationale réformée, une nouvelle Éducation nationale médiatique, et une École permanente ouverte à tous.
Premier pilier : La transformation de l’Éducation nationale.
Cette transformation s’organise autour de deux axes majeurs : la règle des trois tiers et la tridisciplinarité des enseignants.
1. Dans la règle des trois tiers, les matières actuelles seraient réduites pour n’occuper qu’un tiers du temps scolaire. Un deuxième tiers serait consacré à de nouvelles disciplines, tandis que le dernier tiers établirait des passerelles entre ces savoirs, tout en explorant les questions existentielles et les enjeux de la vie sociale.
Des sujets comme les pièges de l’achat ou de la location d’un logement, les subtilités des contrats bancaires ou d’assurance, les choix alimentaires ou de mode de vie sont actuellement délaissés.
De même, les grands chocs émotionnels - naissance d’un premier enfant, accident, maladie - et leurs implications sont trop peu évoqués dans le parcours éducatif.
2. La tridisciplinarité des enseignants serait rendue nécessaire par l’élargissement du champ des matières. Elle viserait une efficacité pédagogique accrue, tant pour l’enseignant que pour ses élèves. Chaque professeur maîtriserait ainsi deux disciplines supplémentaires, l’obligeant à sortir de ses méthodes habituelles et à mieux communiquer avec les élèves rétifs à sa matière principale.
Des expériences menées en Finlande montrent que cette approche, couplée à une réduction des effectifs par classe, améliore à la fois la satisfaction des professeurs et les résultats des élèves (étude PISA 2022).
Les deuxième et troisième piliers : la création de deux structures parallèles à l’Éducation nationale, l’Éducation nationale médiatique et l’École permanente.
1. L’Éducation nationale médiatique interviendrait sur les réseaux sociaux et autres médias numériques. Sa mission : balayer le plus largement possible le spectre des plateformes en ligne, avec un affichage prioritaire de contenus pédagogiques sur tous les sites internet – exactement comme les publicités s’imposent actuellement à chaque clic.
2. L’École permanente offrirait à l’ensemble de la population un accès continu à l’éducation. Des cours dans de nombreuses matières seraient dispensés en soirée et le week-end, dans le cadre d’un dispositif de formation permanente lié ou non au parcours professionnel.
Des passerelles avec le corps médical ou l’autorité judiciaire permettraient la recommandation de tel cursus, sur le modèle des stages de récupération de points du permis de conduire.
L’enseignement supérieur et l’apprentissage pourraient, quant à eux, conserver leur organisation actuelle, tandis que cette refonte se concentrerait sur les niveaux primaire et secondaire ainsi que sur l’éducation des adultes.
LE RAISONALISME N’EST PAS UN DOGME, MAIS UNE BOUSSOLE.
Avec une Éducation nationale devenue « globale » en son sein et un interventionnisme éducatif omniprésent à l’extérieur, cette refonte vise à redonner à la population – jeunes comme adultes – les bases d’une vie personnelle sereine et cultivée. L’objectif ultime : une société aux échanges apaisés, fondée sur des citoyens mieux formés et mieux armés face aux défis contemporains.
Le raisonalisme économique ayant posé les bases d’une société juste et équilibrée, son application à la culture générale ouvrira les portes d’une vraie richesse intérieure et collective, décorrélée d’un capitalisme en voie d’implosion.
Gustave TATOUCHE
auteur essayiste



Laisser un commentaire