Face à la montée des eaux en Outre-mer, le CESE appelle à mettre en œuvre des politiques d’adaptation territorialisées
Avis : « La montée des eaux dans les Outre-mer : quelles stratégies pour s’adapter ? »
Le conseil économique, social et environnemental (CESE) a adopté en séance plénière le 13 mai l’avis « La montée des eaux dans les Outre-mer : quelles stratégies pour s’adapter ? », avec 126 voix pour. Face à la vulnérabilité des territoires ultramarins en raison de leur géographie et de leur exposition aux conséquences de la montée des eaux, le CESE alerte sur la nécessité d’agir dès à présent pour en atténuer et prévenir les conséquences. L’avis a été présenté par Pierre Marie-Joseph, chef d’entreprise (groupe des Outre-mer), Sabine Roux de Bézieux, présidente de la Fondation de la Mer (groupe agir autrement pour l’innovation sociales et environnementale) et Hélène Sirder, avocate et ancienne première vice-présidente de la collectivité territoriale de Guyane (groupe des Outre-mer).
Inéluctable, la montée des eaux liée au changement climatique manifeste déjà ses effets visibles sur notre environnement. En 2024, le niveau moyen des eaux a augmenté de 0,59 centimètres, soit 0,16 centimètres de plus que ce qui avait été prévu par les scientifiques. Les Outre-mer, qui concentrent à eux seuls plus de 70 % du littoral français, sont en première ligne face à ce phénomène qui aggrave l’érosion côtière et s’accompagne d’événements climatiques de plus en plus violents – cyclones, tempêtes, sécheresses, pluies diluviennes – dont les effets cumulatifs menacent les territoires.
Avec des villages menacés de disparition, des terres agricoles perdues, et des infrastructures endommagées de manière irréversible, les conséquences se font déjà sentir et appellent au déploiement d’une stratégie d’adaptation concrète et efficace.
Face à ce constat, les territoires d’Outre-mer ne restent pas inactifs et se mobilisent à travers des initiatives concrètes que le CESE recense et dont il appelle à s’inspirer. Le CESE encourage par ailleurs à privilégier les solutions fondées sur la nature qui permettent aux pouvoirs publics de gagner du temps précieux dans l’adaptation.
Par ailleurs et pour contribuer à enrichir l’avis, le CESE a conduit une enquête inédite auprès d’entreprises implantées en Outre-mer afin d’évaluer leur perception et leur niveau de préparation face à la montée des eaux. Ce questionnaire a permis de dresser un panorama précis des risques déjà observés et des impacts anticipés sur les infrastructures portuaires, aéroportuaires, touristiques ou agricoles qui soulignent l’urgence économique et sociale autant qu’environnementale à agir.
Dès lors, le CESE appelle à renforcer les actions engagées et formule de nouvelles recommandations opérationnelles pour adapter les territoires. Pour cela, il dresse dans son avis un état des lieux pour chaque territoire ultramarin, présente les solutions actuellement disponibles et en souligne les limites. Il identifie enfin les évolutions indispensables pour mieux organiser l’adaptation face à la montée des eaux.
Ainsi, le CESE formule un ensemble de 14 préconisations structurantes et concrètes formant une stratégie d’adaptation. Elles visent à anticiper et à atténuer les impacts de la montée des eaux dans les Outre-mer en mobilisant tous les leviers d’action nécessaires, à la fois diplomatiques, réglementaires, scientifiques, territoriaux, économiques, éducatifs et citoyens. Ces recommandations s’articulent autour de trois axes :
- Assurer le financement et l’assurabilité
Le CESE préconise que les outils actuels et futurs de financement de l’atténuation intègrent désormais les politiques d’adaptation, avec une priorité pour les Outre-mer qui n’ont que très peu de leviers d’atténuation.
- Organiser des politiques d’adaptation territorialisées
Le CESE recommande au ministère des Outre-mer de désigner, dans chaque préfecture, un référent unique chargé de piloter l’adaptation à la montée des eaux. Ce référent facilitera la coordination entre les élus, les services de l’État et les acteurs locaux. Il sera le point de contact pour mobiliser les expertises nécessaires, actualiser les documents d’aménagement à tous les niveaux (régional, départemental, local) et pourra également organiser des « COP régionales » pour faire avancer les actions sur chaque territoire.
Le CESE demande au ministère de la Transition écologique de mieux prendre en compte les spécificités des Outre-mer dans les grandes stratégies nationales, comme le Plan d’adaptation au changement climatique (PNACC-3) et la Stratégie de gestion du trait de côte. Il propose d’y intégrer des approches adaptées à chaque territoire et demande aussi que ces documents tiennent compte des effets de la montée des eaux à moyen et long terme, en s’appuyant sur des scénarios basés sur les données scientifiques.
Le CESE appelle à l’harmonisation des documents d’aménagement et d’urbanisme en regroupant tous les plans existants dans le schéma d’aménagement régional (SAR). Ce schéma doit s’appuyer sur l’ensemble des outils disponibles pour mieux intégrer les enjeux liés à la montée des eaux. Par ailleurs, le CESE recommande aux préfets et aux maires d’Outre-mer de mettre à jour tous les documents d’urbanisme, comme les plans locaux d’urbanisme (PLU) ou les plans de prévention des risques naturels (PPRN), pour y intégrer les risques liés à la montée des eaux.
- Mobilisation de l’ensemble des acteurs économiques, éducatifs et citoyens autour de solutions concrètes et durables
Le CESE préconise de sensibiliser les élèves aux risques liés à la montée des eaux en désignant des éco-délégués dans toutes les classes, en organisant des « COP jeunes » dans chaque établissement et en systématisant des aires marines éducatives.
Parallèlement, le CESE recommande que les chambres consulaires et les réseaux d’organisations professionnelles soient chargés d’animer le volet économique de l’adaptation des entreprises, en collaboration avec les services de l’État et des collectivités locales
Enfin, le CESE propose d’associer les Conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (CESER) à la définition des politiques d’adaptation et à l’organisation de « COP régionales » thématiques pour sensibiliser la population et co-construire les politiques d’adaptation.
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Troisième assemblée constitutionnelle de la République, le CESE conseille le Gouvernement et le Parlement et participe à l’élaboration et à l’évaluation des politiques publiques dans ses champs de compétences. Il regroupe 175 membres, femmes et hommes de terrain, désignés par les corps intermédiaires : associations, syndicats de salariées et salariés, organisations patronales… Le CESE est le lieu privilégié d’expression de la participation citoyenne. Thierry Beaudet est président du CESE depuis mai 2021.
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