Crise à Mayotte: le CESE appelle au respect urgent du principe d’égalité républicaine pour les citoyens mahorais
Avis : « Projet de loi de la programmation pour la refondation de Mayotte »
Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a rendu le 17 avril un avis sur le projet de loi de la programmation pour la refondation de Mayotte dans le cadre d’une procédure accélérée faisant suite à une saisine gouvernementale. Sur la base du rapport annexé à l’article 1 du projet de loi, la délégation aux Outre-mer du CESE propose des préconisations complémentaires et des actions prioritaires pour le développement futur de l’île de Mayotte. L’avis a été présenté au Bureau du CESE par Eric LEUNG (Groupe des Outre-Mer) représentant des organisations exerçant leurs activités dans les Outre-mer, Alain LE CORRE (Groupe CGT) Secrétaire Régional de la CGT-Bretagne et Nadine HAFIDOU (Groupe entreprises) Secrétaire de la Chambre de Commerce et de l’Industrie de Mayotte.
Depuis plusieurs années, l’île de Mayotte connait une situation de tensions profondes liées aux inégalités sociales, au chômage, aux difficultés d’accès aux droits et aux services publics, qui génèrent un fort sentiment d’abandon. 200 000 personnes vivent sous le seuil de pauvreté, soit 77 % de la population mahoraise. Dans un contexte de forte croissance démographique, la situation à Mayotte pose des défis majeurs en termes d’infrastructures, de services publics et de gestion des flux migratoires. En 2022, le CESE s’était prononcé, dans une déclaration du Bureau, en faveur d’un projet de loi pour un développement accéléré de Mayotte.
Face aux destructions massives causées par les cyclones Chido et Dikeledi, le CESE réaffirme l’urgence d’une réponse immédiate et d’une intervention rapide de l’État, couplées à un investissement de long terme afin de promouvoir un développement durable de l’île de Mayotte. Dans le cadre de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte, le CESE réclame le respect du principe d’égalité républicaine pour les citoyens mahorais, et de le rendre effectif dans les plus brefs délais.
Le CESE prend notamment acte de la volonté du gouvernement d’accélérer la convergence des minimas sociaux et salariaux en 2031, au lieu de 2036, et insiste sur la nécessité d’un réel accompagnement des entreprises par l’Etat et les entreprises donneuses d’ordres pour atteindre cet objectif.
Le CESE demande de rendre effective cette égalité républicaine dans les plus brefs délais, et 2031 doit rester une date butoir de fin de travaux, assortis d’un échéancier à démarrage immédiat, établi et réalisé en pleine concertation avec les acteurs du territoire.
- Un recensement démographique précis et exhaustif à mener
Le CESE approuve le projet de recensement démographique permettant d’objectiver et d’adapter en conséquence les moyens budgétaires consacrés à Mayotte, déjà appelé de ses vœux dans la déclaration du Bureau de 2022. Il est nécessaire de réaliser un recensement démographique précis pour adapter les politiques publiques aux besoins réels de Mayotte, face à une croissance démographique rapide. De surcroît, il faut réguler les flux migratoires en alignant le droit des étrangers sur le droit commun, afin de mieux gérer les arrivées et de réduire les situations de précarité.
Pour aller plus loin, le CESE préconise de mettre fin au titre de séjour territorialisé à Mayotte et d’aligner le droit des étrangers bénéficiant d’un visa sur le droit commun.
- Une mobilisation collective d’ampleur pour lutter contre la pauvreté
Selon le département, 30% des aides ne seraient pas réclamées par les bénéficiaires potentiels, ce qui conduit à une situation de mal-logement inquiétante : la moitié de la population vit dans des habitats précaires non raccordés aux réseaux d’eau potable, d’assainissement et d’électricité. Le CESE appelle à faire de la lutte contre l’habitat indigne une priorité politique, en l’associant à un plan ambitieux de construction de logements sociaux.
- Une adaptation nécessaire au changement climatique
Les atteintes à l’environnement sont multiples à Mayotte et mettent en danger une biodiversité très riche. Le territoire a besoin d’être préparé aux conséquences du changement climatique en investissant dans des équipements de distribution d’eau et de protection du littoral. Le CESE alerte aussi sur le manque de préparation de l’île face au phénomène de montée des eaux, alors que 80% des constructions de Mayotte sont situées en zone littorale.
Le CESE soutient l’orientation inscrite dans le projet de loi de réaliser des campagnes scientifiques et de mettre en place des outils de surveillance et de prévention des risques naturels. Pour aller plus loin, il préconise de réviser tous les schémas d’aménagement de Mayotte en intégrant les risques liés à la montée des eaux, notamment de non-constructibilité du littoral et le déplacement des infrastructures hors des zones submersibles.
- L’accès à l’eau potable et à l’assainissement : une priorité absolue
Mayotte vit sous la menace permanente de pénuries d’eau, de maladies hydriques, et de graves inégalités
d’accès. Il apparaît nécessaire pour le CESE de mettre en place un tarif social de l’eau sous condition de ressources, avec un forfait de 400 litres d’eau par jour par foyer. Le CESE insiste sur l’urgence d’améliorer l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, en investissant dans des infrastructures adaptées et en instaurant un tarif social pour les ménages précaires. Le CESE demande également un renforcement de la surveillance sanitaire de l’eau.
- Une transition énergétique plus volontariste
Le CESE appel à reprendre Électricité de Mayotte (EDM) par EDF SEI pour accompagner la transition énergétique de l’île et préconise d’accélérer la transition énergétique en développant les énergies renouvelables (solaire, agrivoltaïsme). Nationaliser Électricité de Mayotte permettrait de mieux répondre aux besoins d’investissement et de modernisation des infrastructures.
- Atteindre l’autonomie alimentaire en 2030
Le CESE préconise d’assouplir temporairement les modalités d’importation de produits agricoles (nourriture animale, fruits et légumes…) issus de la zone régionale pour soutenir la reprise agricole après les cyclones. Pour garantir l’autonomie alimentaire, le CESE propose de diversifier les productions locales, de développer les circuits courts et de soutenir les filières agricoles et de pêche. Il recommande également un encadrement des prix des produits alimentaires pour lutter contre la vie chère.
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Contact presse :
Ema Hazan
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